MIGRANTSMarseille rouvre le débat sur l’accueil de bateaux de sauvetage en France

Marseille : En ouvrant son port, la ville peut-elle sortir les bateaux de sauvetage de « situation épouvantable » ?

MIGRANTSL’annonce des dirigeants de Marseille, prêts à ouvrir leur port au Louise Michel, ce bateau affrété par l’artiste Banksy pour porter secours aux migrants en Méditerranée, pourrait relancer le débat sur l’accueil de ces navires
Des migrants secourus sur le Louise Michel, le bateau de secours affrété par Banksy.
Des migrants secourus sur le Louise Michel, le bateau de secours affrété par Banksy.  - Santi Palacios/AP/SIPA
Adrien Max

Adrien Max

L'essentiel

  • Samedi, Michèle Rubirola, la maire de Marseille, et Benoit Payan, son premier adjoint, ont annoncé être prêts à ouvrir leur port au Louise Michel.
  • Ce bateau affrété par l’artiste Banksy pour porter secours aux migrants en Méditerranée a lancé plusieurs appels à l’aide ce week-end, restés sans réponse.
  • Les autorités de Lampedusa et le Sea Watch 4 ont finalement pu récupérer les nombreux naufragés sauvés par le Louise Michel samedi soir.

Une prise de position qui n’a pas manqué de faire réagir. Michèle Rubirola, la nouvelle maire de Marseille issue d’une majorité de gauche, et Benoit Payan, son premier adjoint, ont annoncé samedi qu’ils étaient prêts à ouvrir le port de Marseille si le Louise Michel, ce bateau de sauvetage en Méditerranée affrété par l’artiste Banksy, en faisait la demande.

Le navire a lancé plusieurs appels à l’aide le week-end dernier, après avoir secouru 219 personnes en Méditerranée. Des appels longtemps restés sans réponse. « Après le premier "mayday relais", les autorités de Lampedusa nous ont dit que ce n’était pas de leur ressort. La situation était épouvantable lorsque nous sommes arrivés près de leur embarcation. Les hommes se tenaient sur le bord de l’embarcation, les femmes et les enfants baignaient au milieu, dans un mélange d’eau de mer et de gazole. Ils étaient recouverts de brûlures. Il y avait également un cadavre à bord. Et ils nous ont expliqué que trois autres personnes étaient mortes noyées », témoigne Marie, membre de l’équipe support restée à quai.

Marge de manœuvre limitée

Face à cette situation, l’équipage a décidé de transférer un maximum de personnes à bord du Louise Michel, avant d’en placer sur un radeau de survie avec de la nourriture et de l’eau. « Le Louise Michel s’est retrouvé dans l’incapacité de manœuvrer à cause du remorquage du radeau de survie, mais à aucun moment le bateau ne s’est mis en danger », tient à préciser Marie.

Les migrants ont été découverts sur cette embarcation, avec des femmes et enfants brûlés par le mélange d'eau de mer et de gazole. Un cadavre se trouvait aussi à bord.
Les migrants ont été découverts sur cette embarcation, avec des femmes et enfants brûlés par le mélange d'eau de mer et de gazole. Un cadavre se trouvait aussi à bord.  - Santi Palacios/AP/SIPA

Sans avoir de contact avec les gens à bord, les autorités de l’île italienne Lampedusa sont finalement venues récupérer samedi les 49 rescapés les plus mal en point, avant que les autres ne soient transférés à bord du Sea Watch 4.

La prise de position des dirigeants de Marseille pourrait-elle faire évoluer ces situations dans lesquelles se retrouvent les bateaux de sauvetage, alors que la plupart des ports se montrent réticents à les accueillir ? Marie rappelle le droit maritime, que l’équipage du Louise Michel suit à la règle : « il prévoit que le bateau débarque dans le port le plus proche ». Dans cette situation précise, Marseille se trouvait à l’autre bout de la Méditerranée. Et la municipalité n’a de toute façon pas la possibilité de prendre seule cette décision, les ports français étants sous tutelle de l’Etat.

« On ne laisse pas des personnes se noyer en mer »

« Cette situation demande une responsabilité, si le Louise Michel est en détresse et qu’il nous fait la demande de venir à Marseille, nous, on l’ouvre le port », rétorque Benoit Payan. Pour Marie, cette prise de position a le mérite de réouvrir le débat, mais la question du port d’accueil en cache une autre. « La véritable problématique réside dans la répartition entre pays des personnes secourues plus que sur le port d’accueil », explique-t-elle.

« L’Italie prend seule la charge de ces personnes secourues aux larges des côtes Libyenne et de Lampedusa, ce n’est plus possible. L’Etat français doit se saisir de cette situation », estime Benoit Payan. Mais depuis leur prise de position du week-end, « la présidence de la République ne s’est pas manifestée », fait savoir Benoit Payan, qui en remet une couche : « Si le Louise Michel en fait la demande, notre port reste ouvert. Quelle que soit la couleur de peau, on ne laisse pas des personnes se noyer en mer ».

Environ 300 migrants ont déjà péri en 2020 lors de la traversée de la Méditerranée, mais l’Organisation internationale pour les migrations estime que ce chiffre pourrait être beaucoup plus élevé.

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