Quelle place pour les prêtres et les paroisses au sein de l’Église dans le futur?
Le dernier rapport de l’Église catholique, publié ce mercredi, témoigne d’une institution diverse confrontée à la chute des vocations.
- Publié le 19-11-2020 à 09h24
- Mis à jour le 22-12-2020 à 07h07
Chaque année désormais, l’Église en Belgique publie un rapport chiffré objectivant sa présence dans le pays. Et chaque année, elle met en avant un ensemble de données : la place des femmes en son sein l’an dernier, la vitalité de ses projets de solidarité et l’investissement des laïcs cette année. On y découvre ce mercredi, dans ce qui est son troisième rapport, une Église multiple qui irrigue la société belge à travers 2 000 projets de solidarité et grâce à plus de 144 000 bénévoles.
Derrière ces chiffres encourageants pour l’Église (même si en léger recul), on découvre des personnes très engagées, note la chargée de cours en théologie à l’UCLouvain Catherine Chevalier qui a accompagné la rédaction du rapport. Mais se cachent aussi deux importantes questions pour l’avenir de l’Église. "Quelle posture les catholiques doivent-ils adopter pour témoigner à la fois avec clarté de la dimension spirituelle qui les habite, et pour rester, dans le dialogue, proches de tous ? C’est une vraie question qui travaille les catholiques, et à laquelle ils n’ont pas toujours réponse", note-t-elle. En d’autres mots, comment l’Église peut-elle être au service de tous dans une société multiculturelle, sans se transformer en une ONG qui passerait sous silence la dimension transcendante sur laquelle elle s’appuie ?
La deuxième réflexion touche à la structure ecclésiale. Depuis mille ans, et plus encore depuis le Concile de Trente en 1545, l’Église s’articule autour des prêtres et des paroisses. La chute des vocations l’oblige à se repenser en profondeur pour s’organiser en fonction de l’engagement des laïcs.
La peur de tout lâcher
La communication de l’Église qui met en avant la place de ces laïcs signe la volonté des évêques d’aller en ce sens, même si leur attitude reste "ambivalente", note Catherine Chevalier. "Dans tous les diocèses, le travail des laïcs est pris au sérieux, et en même temps on ressent comme une peur de ‘tout lâcher’, de penser autrement la question de la place des prêtres. Ceux-ci ne sont d’ailleurs pas toujours accompagnés comme il le faudrait pour vivre tous ces changements."
Cette question de l’organisation structurelle de l’Église n’est pas innocente. Elle implique des évolutions qui relèvent de Rome (pensons à la place des femmes), elle oblige à considérer la place des sacrements qui sont au cœur de la foi catholique, à repenser la formation des laïcs et les dispositions légales qui encadrent les cultes. "L’Église a pu faire en sorte que des financements de l’État dédiés à des prêtres soient alloués à des laïcs, mais de telles modifications ont des limites."
Comme le prouve ce rapport, l’Église est entrée dans une transition historique face à laquelle l’institution belge, entre les nécessités légales et les compétences de Rome, n’est pas totalement autonome. Elle se situe dès lors entre deux modèles, ce qui est souvent difficile à vivre pour les croyants. "Comme d’autres institutions dans un monde en crises, l’Église en Belgique peine à penser son avenir, à définir une vision prospective au-delà d’heureuses initiatives locales. Elle devrait s’engager dans un travail de réflexion plus collectif et audacieux", conclut Catherine Chevalier. Un questionnaire sur l’avenir de l’Église a été envoyé aux catholiques en octobre. Les prochains mois diront ce qu’il en sortira.